L'école, facteur d'integration.
L'école républicaine était portée par le projet politique de fonder la république. Elle devait apprendre aux enfants les valeurs des lumières et de la patrie; elle était l'héritière d'un projet révolutionnaire fortement atténué. Elle devait construire une morale laïque à côté de la morale religieuse, elle devait, à travers l'enseignement de l'histoire et de la géographie, installer une conscience nationale moderne. L'école intégrait les citoyens dans la mesure où elle avait pour tâche d'affaiblir les particularismes et les langues locales. Bref, elle intégrait les enfants parce qu'elle devait intégrer la société française elle-même. [...] Face au capitalisme, l'école républicaine pouvait sembler juste, même aux yeux de ceux qui étaient condamnés à la seule école élémentaire. Elle n'excluait personne et semblait reconnaître les talents exceptionnels. Les enfants d'ouvriers et de paysans ne devenaient pas ouvriers ou paysans parce qu'ils avaient échoué à l'école, mais parce que la société était injuste ou parce que c'était là leur destin. La preuve de la justice scolaire était que les meilleurs d'entre eux pouvaient se soustraire à ce destin, grâce à l'école. Le personnage du boursier suffisait à prouver la réalité de la justice de l'école républicaine.
Au cours des années 1990, la montée du chômage, la violence dans les banlieues ont rendu plus difficile l'intégration des jeunes. La société se tourne vers l'école car celle-ci apparaît comme la seule institution socialisante apte à régler ces problèmes, en particulier dans les quartiers en difficulté. Pour beaucoup d'élèves, l'école n'est plus en droit d'imposer des exigences dès lors qu'elle ne semble plus préparer à l'emploi. Ses conditions de fonctionnement lui imposent de socialiser les jeunes en même temps que de les instruire, de leur faire accepter leur condition d'élève et les règles de la vie scolaire,