L'île mystérieuse
La nuit tombait en ce soir de fin juin, et seul le bruit des vagues s’écrasant lourdement contre la proue du bateau se faisait entendre. Quelques marins se promenaient sur le pont, fumant leur cigarette et inspectant les moindres recoins de l’engin. Tout devait être parfait pour le lendemain, jour où les premiers voyageurs monteraient à bord. Le « Fracas » ferait sa traversée inaugurale de l’Atlantique en neuf jours, et tout devrait se passer sans encombre si la compagnie maritime voulait pouvoir réitérer l’expérience et amortir les frais que le paquebot avait engendrés.
Une légère pluie d’été commença à tomber, encourageant les matelots à se mettre à l’abri à l’intérieur. Une odeur encore forte de peinture et de plâtre embaumait dans tout le bateau, et le léger fumet des cuisines se mettant en marche ne parvenait pas à la masquer.
Les marins décidèrent de prendre du repos et rejoignirent leur cabine. Le lendemain s’annonçait chargé, et il n’était pas question que l’équipage ait l’air fatigué.
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Il était cinq heures du matin lorsque Danaé s’était réveillée. Trop excitée par le périple qu’elle allait vivre, elle s’était précipitée sur sa valise et avait couru prendre un taxi. Cette jeune journaliste dans la vingtaine avait été pressentie par son rédacteur en chef pour participer au voyage inaugural du « Fracas », le plus grand paquebot de tourisme jamais construit, mais aussi le plus rapide de toute l’histoire. L’embarquement était fixé à dix heures, mais emportée par son enthousiasme, la jeune femme avait préféré s’y rendre en avance, afin d’être une des premières à poser les pieds sur le géant de fer.
Le jour n’était pas encore levé, mais déjà la ville commençait peu à peu à sortir de son sommeil. Quelques klaxons résonnaient à chaque coin de rue, et des visages endormis et blêmes sortaient des immeubles ternes de la banlieue du Havre.
Arrivée au port, Danaé remarqua avec une certaine déception qu’elle n’avait pas été la seule à