L ame mediteranéenne
Voilà cinquante ans qu’Albert Camus est mort. Déjà cinquante ans que sa plume ne brûle plus attisée par ses passions ou ses révoltes. Pour réchauffer nos âmes engourdies par un monde toujours aussi absurde, reste son œuvre riche, lucide, généreuse, intemporelle…
Dès son premier roman, L’envers et l’endroit, écrit à l’âge de vingt trois ans, Albert Camus annonce sans ambiguïté, son rapport particulier aux éléments naturels, son attachement sensuel à l’Algérie, le regard singulier qu’il porte sur les gens, comme s’il les voyait d’abord de l’intérieur.
Cependant c’est très certainement Noces (1939) suivit de L’Eté (1954), alors qu’il souffre d’un exil français, qui révèlent ce que certains critiques nommeront « l’écriture solaire » d’Albert Camus. En effet chaque page est un véritable hymne à la beauté méditerranéenne. L’auteur nous offre une succession de paysages colorés desquels, des senteurs multiples émanent et nous transportent, par le biais des sensations, toujours plus loin dans l’émotion. Nous éprouvons alors très certainement, ce que Baudelaire évoquait dans L’invitation au voyage : une sorte de déplacement intérieur ou l’éveil de tous les sens offre le plus grandiose des tableaux.
« Là, tout n’est qu’ordre et beauté, Luxe, calme et volupté. »[1]
Chaque mot porte l’empreinte de l’amour que l’auteur ressent pour la nature, et à l’instar de son ami René Char, pense qu’elle est l’unique lieu de réconfort et de reconstruction. Elle seule a le pouvoir de réconcilier l’homme avec le monde.
Lire Albert Camus c’est comprendre la pensée grecque, c’est adhérer à la vision de Plotin sur la nature. Car, pour le philosophe grec, l’art est la matérialisation de la sensibilité de l’être. Elle est le lieu d’unification entre le monde sensible et celui intérieur de l’homme; une sorte d’expérience métaphysique par laquelle le créateur apporterait le témoignage de l’existence d’un univers réunissant le monde sensible et le monde