L'erreur des romanciers de croire qu'on a le temps de les lire
En effet, du point de vue de l’auteur, il semble que des écrivains aient commis une erreur en étalant leurs romans pour des publiques de leur époque, qui les lisaient sous forme de feuilleton. C’est ce que l’exemple du Une ténébreuse affaire de Honoré de Balzac nous permet d’illustrer. Ce roman qui fait partie de l’œuvre romanesque de Balzac, Les Comédies Humaines. En 1841, Balzac écrit Une ténébreuse affaire en forme de 100 feuilletons publiées dans les journaux. Cette division en deux épisodes par semaine causa un étalement de l’œuvre, qui par conséquence mena aux lecteurs modernes de ne pas avoir temps de le lire. De l’aveu du journaliste Arthur de Gobineau le 31 décembre 1844, l’esprit de Balzac « est on ne peut plus dépaysé sur le terrain où il cherche à se placer en intrus ; il a beau faire, en dépouillant ses qualités propres il ne peut parvenir à se donner le bavardage fluide qui fait la gloire et les triomphes des plus fortunés romanciers ... »
Or, il semble que le texte romanesque exige de son lecteur beaucoup de temps, même si le texte est court, il requiert de l’attention, de la compréhension et un bon niveau de langue pour pouvoir vraiment, entièrement « lire » un roman. C’est ce que l’exemple de Le Tiers Livre des faicts et dicts Heroïques du noble Pantagruel par François Rabelais nous permet d’illustrer. Dit ans après ces deux autres œuvres, Rabelais publie Le Tiers États en 1546 Cette œuvre de Rabelais a pour qualification une « œuvre humaniste » qui s’adresse au gens « studieux et savants », qui est donc très difficile à lire. L’œuvre demande de la culture avec des nombreuses citations en latin. Rabelais insert dans son roman des débats médicaux, juridiques, moraux