L’influence de l’épopée du roi gesar de ling sur chögyam trungpa rinpoché
Par Robin Kornman – 2004
INTRODUCTION
Chögyam Trungpa Rinpoché a été un important représentant d’un courant de pensée du bouddhisme tibétain qui a fleuri vers la fin du 19e et au début du 20e siècle, le Ris med ou ‘École Éclectique’. Les chefs de file de ce mouvement – érudits et maîtres de méditation – étaient issus de différentes lignées ou sectes du bouddhisme tibétain. L’un d’eux représentait même la religion autochtone non-bouddhiste du Tibet, le Bön. Ils ont rassemblé les enseignements et les pratiques de leurs différentes lignées dans une synthèse nouvelle, synthèse qui a permis aux pratiquants de chaque école d’avoir accès aux meilleurs enseignements des autres écoles. Dans sa XIe incarnation, Trungpa Rinpoché a été élevé pour devenir un éminent porte-parole de ce mouvement et pour en faire progresser le projet au sein de la société monastique et académique de la région Nord-Est du Tibet, aux frontières de la Chine. Comme nous le verrons dans cet essai, les Éclectiques ne constituèrent pas seulement un mouvement philosophique syncrétique ; certains d’entre eux semblent avoir eu également une vision sociopolitique – une vision de la manière de réaliser l’union d’une société laïque et d’une religion mystique. Ce programme ne se trouve dans aucun texte politique, car l’étude de la politique, telle que nous la concevons depuis Platon et Aristote, n’existait pas en Asie Mineure. Dans cette région aride et à la population clairsemée, dominée par des pasteurs nomades, il n’existait rien de tel qu’un polis, une cité, telle que nous les connaissons. Il n’y avait pas d’entité géographique de ce genre, qui aurait pu engendrer un gouvernement, à propos duquel on aurait pu élaborer une théorie. Alors qu’en Grèce on trouve des Cités-États ou des empires, on trouve au nord-est du Tibet des groupes de nomades, des centres où ils faisaient du commerce, l’empire chinois à l’Est, et des exemples de