Le premier chapitre d'Economie et société est consacré aux concepts fondamentaux de la sociologie (l'action et les relations sociales, l'ordre légitime, la lutte, la communalisation et la sociation, le groupement, la domination...). Il offre, en guise d'entame, une définition de la sociologie entendue comme une science empirique« qui se propose de comprendre par interprétation l'action sociale et ce faisant d'expliquer causalement son déroulement et ses effets ». M. Weber signifie de la sorte que la tâche du sociologue consiste à saisir le sens qui motive ces actions spécifiques à l'occasion desquelles les individus prennent en considération le comportement d'autrui. Le sociologue doit aussi expliquer, à l'aide du principe de causalité, la séquence des faits dans laquelle prennent place ces actions. Dans la tradition allemande des sciences de l'esprit, M. Weber fait ainsi sienne l'idée en vertu de laquelle, à la différence de celui de la nature, le monde des hommes est façonné par des valeurs, des intérêts... qui gouvernent les actions des uns et des autres. Alors que les sciences naturelles ont affaire à des objets qui s'imposent à la conscience comme des données extérieures, les sciences de l'esprit travaillent sur l'expérience vécue des individus. Produit par et pour des êtres de conscience, les actions sociales sont des activités chargées de sens, donc compréhensibles par d'autres hommes.
Expliquer et comprendre
Voilà pourquoi expliquer (erklären) ne va pas sans comprendre (verstehen). Pour M. Weber, la compréhension peut être soit rationnelle (je comprends aisément le mode de raisonnement de celui qui pose l'opération 2 x 2 = 4) soit empathique (je peux me mettre en pensée à la place d'autrui pour rendre compréhensible ce qui motive son action). La manière dont M. Weber aborde le droit offre une bonne illustration de l'originalité de la démarche compréhensive. A la différence du juriste dogmaticien, le sociologue n'a pas pour ambition de vérifier la