Lundi 9 novembre 2009

Magazine Littéraire
74, avenue du Maine

F - 75014 Paris

Monsieur,
J'aimerais bien répondre au critique littéraire de Dora Bruder qui s'étonne que l'auteur Patrick Modiano, alors qu'il publie une biographie, ne cesse de parler de lui-même en parlant de Dora Bruder. À mon avis, cet ouvrage n'est pas entièrement une biographie éponyme.
En effet, il y a des aspects autobiographiques dans son récit. Le narrateur, qui est d'ailleurs à la fois l'auteur de Dora Bruder révèle des souvenirs de sa propre jeunesse en s'appuyant sur "les paniers à salade" à la page 91, "La Place de l'Étoile" à la page 117 et notamment "la fugue" à la page 99.
De plus, dans cet ouvrage de Modiano, il y a des aspects historiques, c'est à dire qu'il a dû mener un travail de généalogiste. Son idée de reconstruire une époque est illustrée par de nombreuses répétitions des mots-clés "photo", "trace", "archives de la Préfecture de police" tout au long du livre, ce qui permet à l'auteur de stimuler l'imagination, une fois qu'il a trouvé des indices sur des personnages.
Donc, en tenant compte de ces différents aspects biographiques, autobiographiques et historiques, j'en déduis qu'il s'agit d'une autofiction, c'est à dire un récit consacré à soi-même mais aussi à la fiction.
D'une part, dans Dora Bruder, le narrateur raconte cette énigme qu'est son père. Il essaye de comprendre en reconstituant les événements. À la page 33 par exemple, les deux phrases simples "Impossible de trouver mon père. Je ne l'ai plus jamais revu." traduisent la disparition du père avec son secret. Le narrateur cherche à comprendre l'attitude du père à son égard, et cette attitude est illustrée par "il m'ignorait comme si j'étais un pestiféré" à la page 92. Dans ce même paragraphe, la rédaction du premier roman de Modiano est évoquée par "mon premier livre - où je prenais à mon compte le malaise qu'il avait éprouvé pendant l'Occupation". Par le détour de la fiction, l'auteur peut donc toucher