Aimé sésaire
Poète de la négritude (avec son compagnon d’études à Paris, le Sénégalais Léopold Sédar Senghor), le Martiniquais Aimé Césaire, qui est aussi un dramaturge et un homme politique (député de la Martinique de 1945 à 1993 et maire de Fort de France de 1945 à 2001), publie en 1950 son Discours sur le colonialisme, à une époque où s’amplifient les revendications et les luttes d’indépendance des pays colonisés.
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I. Une contre-argumentation qui mime le dialogue.
L’extrait s’en prend violemment aux colonialistes en réfutant systématiquement les arguments qu’ils avancent pour soutenir la thèse selon laquelle la colonisation a « apporté », dans plusieurs domaines, de nombreux bienfaits aux pays colonisés.
Dès la première phrase, Césaire met en place une opposition entre sa propre thèse (« je vois bien ce que la colonisation a détruit ») et la thèse des colonialistes immédiatement combattue (« je vois moins bien ce qu’elle a apporté »). Dans cette première phrase, Césaire emploie encore un euphémisme (« je vois moins bien »), mais il va ensuite développer une contre-argumentation beaucoup plus tranchée.
Le même procédé est employé tout au long de l’extrait : Césaire commence par énoncer brièvement un argument des colonialistes, comme s’il reprenait leurs paroles ou les laissait parler, puis il réfute cet argument nettement, mais en prenant son temps, dans de longues phrases où l’on rencontre systématiquement le procédé de l’accumulation.
Les arguments.
a) « Sécurité ? […] Juridisme ? » (l. 4) : avec ces deux mots Césaire veut sans doute signifier que pour les colonialistes, la colonisation a apporté un cadre juridique, une police et une justice, à des pays qui en étaient dépourvus [on peut noter au passage l’emploi d’un mot inapproprié dans le contexte, puisque « juridisme » est en fait un mot de sens péjoratif qui désigne le fait de