Article débat patrimoine
"Demain le Patrimoine"
Intervention de Mme Maryvonne de Saint-Pulgent
Conseiller d’Etat, ancien Directeur du Patrimoine,
Correspondant de l’Institut
PROSPER MERIMEE, OU L'INVENTEUR DU MONUMENT HISTORIQUE
Monsieur le Premier Ministre, monsieur le Chancelier, monsieur le Secrétaire perpétuel, monsieur le Président, mes chers confrères, mesdames, messieurs,
Trois grandes figures des lettres ont inventé en France le patrimoine et parrainé la naissance du service des monuments historiques : Victor Hugo, François Guizot et Prosper Mérimée. Avant même de publier en 1831 Notre-Dame de Paris dont le prodigieux succès popularise la cause des cathédrales, Hugo déclare en 1825 la guerre aux démolisseurs, ceux de la « bande noire » qui sévit alors dans le dépeçage des monuments anciens, et énonce le principe selon lequel il y a deux choses dans un édifice : son usage et sa beauté. Son usage appartient au propriétaire, sa beauté à tout le monde. C’est donc dépasser son droit que de le détruire.
Convaincu que la sauvegarde de leurs grands monuments civils et religieux est de nature à réconcilier les Français avec leur passé prérévolutionnaire, Guizot obtient en 1830 du roi Louis-Philippe, dont il est le tout nouveau ministre de l’Intérieur, la création d’un poste d’inspecteur général des monuments historiques chargé de sauvegarder et de faire connaître l’admirable enchaînement de nos antiquités nationales. Deuxième titulaire de ce poste, après le bref passage de l’historien et critique d’art Ludovic Vitet, auquel il succède en 1834, Mérimée y reste près de vingt ans, jusqu’à son entrée au Sénat en 1853. Ce long règne lui permet d’inventer le système français de protection des monuments historiques et de le marquer d’une empreinte encore sensible aujourd’hui.
À vrai dire, l’invention du monument historique n’est pas tout entière à mettre au crédit de notre trio d’académiciens. Comme souvent, en ce qui concerne la