Autobiographie
La littérature « beur »
∗
Jan Goes
0. Prélude
Les « beurs » sont-ils français ou arabes, maghrébins ? Beaucoup d’entre eux répondront « les deux ».
Après les tentatives désespérées de la première génération d’immigrés de se fondre dans le paysage, la deuxième, voire la troisième revendique son identité bien particulière. La littérature « beur » peut par conséquent être considérée comme une littérature émergente, au carrefour du monde roman et du monde arabe.
Un an après le premier volet de « Littératures francophones du monde arabe », et pour les besoins de
cet article, certaines données sont reprises. En effet, un petit rappel, et une comparaison de la littérature « beur » avec la littérature maghrébine de langue française ne me semblent pas inutiles (cf. le
paragraphe 2).
1. Introduction
Il y a une vingtaine d’années, le phénomène « beur » s’est manifesté au grand jour par la
« marche des beurs » du premier décembre 1983, suivie en 1984 de la création de SOS
racisme. C’est à peu près à ce moment-là que le mot beur lui-même est entré dans notre
vocabulaire courant. Quelques années plus tard, nous rencontrerons sa petite sœur : la
beurette.
En vingt ans, la littérature beur s’est constituée en nouvel espace littéraire, ou plus précisément en un nouvel espace littéraire francophone. On pourrait la qualifier de littérature
émergente, ou en d’autres mots : « un complexe de phénomènes culturels, linguistiques,
idéologiques et sociaux qui donnent lieu à un nouveau corpus de textes, à de nouvelles
sensibilités et qui font partie de la littérature moderne dans une situation de continuité
et de rupture » (cf. Pinçonnat, 2000 : 247, note 1
1
). Dans ces quelques pages, nous allons essayer d’explorer la continuité et la rupture de cette littérature par rapport à cet autre espace littéraire francophone qu’est la littérature maghrébine de langue française.
2.