Bel ami commentaire
Portrait d’un héros en marche vers le succès (Incipit)
INTRODUCTION
Bel Ami est un roman d’apprentissage dont l’intérêt repose sur l’irrésistible ascension d’un personnage central rongé d’ambitions, Georges Duroy. Après Julien Sorel[1] et Eugène de Rastignac[2], cette « graine de gredin, qui va pousser dans le terrain où il tombera » (« Ce terrain est un journal »)[3] ose s’attaquer à Paris, la ville tentaculaire, la ville entre toutes les villes : comme eux, il sait utiliser son charme ; cependant, plus encore qu’eux, il s’avérera être un héros complexe et ambigu. C’est dans ce décor qui offre l’image de toutes les réussites, que nous rencontrons pour la première fois ce jeune arriviste lors de l’incipit du roman, dont les débuts prometteurs sont encore l’occasion pour l’auteur d’Une vie de nous livrer sa vision pessimiste de Paris et de la société « fin-de-siècle ».
I LE PORTRAIT D’UN HEROS EN DEMI-TEINTE
1) La figure centrale d’un roman de formation
Le nom du personnage central est clairement énoncé dès la deuxième ligne, « Georges Duroy »[4] sera donc notre héros, celui-ci fait d’ailleurs une entrée in medias res. Un héros qui est le sujet de quasiment tous les verbes de ce passage, on le suit pas à pas dans son cheminement. Le narrateur accompagne la progression dans l’espace : de l’intérieur du restaurant à la terrasse, de la terrasse au trottoir, du trottoir à la rue Notre Dame de Lorette puis la promenade sur les boulevards. Le champ lexical des lieux montre un héros qui bouge, qui ne se contente pas de penser, qui ne contemple pas mais qui observe et qui agit. Les pensées du personnage sont, elles aussi, en mouvement, elles glissent des femmes présentes, jaugées, à la somme d’argent nécessaire pour terminer le mois, passent par la tenue vestimentaire et le maintien pour se porter enfin sur les passants, qu’il faudra dominer des épaules et bousculer pour se frayer un chemin jusqu’à la réussite.