Classes sociales et territoires
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Le ghetto noir nord-américain aux Etats-Unis s’est imposé dans les représentations collectives comme le destin annoncé des zones de relégation urbaines françaises. La « ghettoïsation » des banlieues difficiles serait inéluctable. Néanmoins, en France, la ségrégation spatiale ne paraît pas s’organiser selon des critères prioritairement ethniques, mais surtout socioéconomiques. Le découpage du territoire (entendu ici comme l’ensemble des lieux de résidence), coïnciderait avec celui de la structure sociale en classes sociales. D’ailleurs, historiquement, la classe ouvrière ne s’identifiait-elle pas aux fameuses « banlieues rouges » qui ceinturaient les grandes agglomérations ? De même, aujourd’hui, les « quartiers difficiles » concentrent les populations les plus défavorisées. Les inégalités socioéconomiques, distinguant les différentes classes sociales, se décalqueraient sur l’espace. Le lien entre classes sociales et territoires nécessite cependant de revenir sur la notion de classe sociale. En effet, au sens réaliste, la classe sociale suppose non seulement une position commune dans les rapports de production, mais aussi une conscience de classe chez ses membres et une capacité à défendre les intérêts de celle-ci. De fait, n’observe-t-on pas de la part des classes supérieures, voire moyennes, des comportements de recherche de l’« entre-soi » qui expliqueraient le découpage social de l’espace ? En ce sens, le territoire serait l’objet de luttes sociales, expression renouvelée de la lutte des classes. En outre, les territoires n’exercent-ils pas en retour des effets sur la constitution des classes ?
A l’encontre de ces positions, certains sociologues ont pu pointer les limites de la mise en équivalence entre classes et territoires. La mixité sociale est même avérée en France. Non seulement le ghetto nord-américain n’a pas forcément de substance dans notre pays, mais il existe des freins, en particulier politiques, à une ségrégation absolue.
C’est pourquoi nous