Coco guy de maupassant
|1 |Dans tout le pays environnant on appelait la ferme des Lucas « la Métairie ». On n’aurait su dire pourquoi. Les paysans, sans doute, attachaient|
| |à ce mot « métairie » une idée de richesse et de grandeur, car cette ferme était assurément la plus vaste, la plus opulente et la plus ordonnée |
| |de la contrée. |
| |La cour, immense, entourée de cinq rangs d’arbres magnifiques pour abriter contre le vent violent de la plaine les pommiers trapus et délicats, |
|5 |enfermait de longs bâtiments couverts en tuiles pour conserver les fourrages et les grains, de belles étables bâties en silex, des écuries pour |
| |trente chevaux, et une maison d’habitation en brique rouge, qui ressemblait à un petit château. |
| |Les fumiers étaient bien tenus ; les chiens de garde habitaient en des niches, un peuple de volailles circulait dans l’herbe haute. |
| |Chaque midi, quinze personnes, maîtres, valets et servantes prenaient place autour de la longue table de cuisine où fumait la soupe dans un |
| |grand vase de faïence à fleurs bleues. |
|10 |Les bêtes, chevaux, vaches, porcs et moutons, étaient grasses, soignées et propres ; et maître Lucas, un grand homme qui prenait du ventre, |
| |faisait sa ronde trois fois par jour, veillant sur tout et pensant à tout. |
| |On conservait, par charité, dans le fond de l’écurie, un très vieux cheval blanc que la maîtresse voulait nourrir jusqu’à sa mort naturelle, |
| |parce qu’elle l’avait élevé, gardé toujours, et qu’il lui rappelait des souvenirs.