Commentaire chapitre 7 d'une vie de maupassant
Non, elle ne voulait pas écouter ni se laisser toucher du bout des doigts ; et elle se jeta dans la salle à manger courant comme devant un assassin. Elle cherchait une issue, une cachette, un coin noir, un moyen de l'éviter. Elle se blottit sous la table. Mais déjà il ouvrait la porte, sa lumière à la main répétant toujours : « Jeanne! » et elle repartit comme un lièvre, s'élança dans la cuisine, en fit deux fois le tour à la façon d'une bête acculée ; et, comme il la rejoignait encore, elle ouvrit brusquement la porte du jardin et s'élança dans la campagne. Le contact glacé de la neige où ses jambes nues entraient parfois jusqu'aux genoux lui donna soudain une énergie désespérée. Elle n'avait pas froid, bien que toute découverte ; elle ne sentait plus rien tant la convulsion de son âme avait engourdi son corps, et elle courait, blanche comme la terre. Elle suivit la grande allée, traversa le bosquet, franchit le fossé et partit à travers la lande. Pas de lune ; les étoiles luisaient comme une semaille de feu dans le noir du ciel ; mais la plaine était claire cependant, d'une blancheur terne, d'une immobilité figée, d'un silence infini. Jeanne allait vite, sans souffler, sans savoir, sans réfléchir à rien. Et soudain elle se trouva au bord de la falaise. Elle s'arrêta net, par instinct, et s'accroupit, vidée de toute pensée et de toute volonté. Dans le trou sombre devant elle la mer invisible et muette exhalait l'odeur salée de ses varechs à marée basse. Elle demeura là longtemps, inerte d'esprit comme de corps ; puis, tout à coup, elle se mit à trembler, mais à trembler follement comme une voile qu'agite le vent. Ses bras, ses mains, ses pieds secoués par une force invincible palpitaient, vibraient de sursauts précipités : et la connaissance lui revint brusquement, claire et poignante. Puis des visions anciennes passèrent devant ses yeux ; cette promenade avec