De la tragédie ou de la comédie, laquelle est plus apte à corriger les défauts des hommes?
D’abord, comme le voulait Aristote, qui, dans sa Poétique, la définit comme « l’imitation d’une action de caractère élevé et complète », la tragédie doit présenter un sujet de caractère élevé et des personnages nobles (rois, princes…) ou même mythologies (tel Œdipe dans La Machine Infernale de Cocteau) à haute élévation morale représentant des valeurs. Cette exemplarité de l’action et des personnages est illustrée dans la préface de Bérénice, de Racine, pièce dans laquelle Titus est empereur romain et Bérénice est reine de Palestine. L’auteur y explique que la tragédie n’est pas nécessairement faite de sang et de mort, mais qu’ « il suffit que l’action en soit grande, que les acteurs en soient héroïques, que les passions y soient excitées, et que tout s’y ressente de cette tristesse majestueuse qui fait tout le plaisir de la tragédie ». On retrouve cette idée de dignité dans l’expression de la souffrance notamment dans la scène 4 du premier acte d’Andromaque de Racine, un dialogue entre Pyrrhus, roi d’Epire, et sa captive Andromaque, princesse troyenne, dont il tombe amoureux. Cette scène offre au lecteur un visage de Pyrrhus impétueux égaré par l’amour, mais aussi manipulateur, contrastant avec l’image d’Andromaque, majestueuse, admirable, qui représente la fidélité non seulement conjugale mais aussi à son peuple. Le lecteur est ainsi incité à suivre les mêmes valeurs que ces personnages illustres dont le destin tragique et exceptionnel fait naître la lutte du héros malgré son impuissance. On peut aussi s’appuyer sur l’exemple d’Antigone d’Anouilh, œuvre dans laquelle l’héroïne, fille des souverains de Thèbes, incarne de manière puissante le besoin de pureté enfoui en chacun d’entre nous, le pouvoir de dire non à l’injustice et de se battre jusqu’au