De nouvelles inégalités sociales?
Par Khalid Tritki
Pour rendre hommage à Paul Pascon, des sociologues et des économistes se sont réunis à Rabat du 8 au 10 décembre. Dans la foulée, ils se sont interrogés sur le devenir de l'agriculture dans le cadre des accords de libre-échange.
Rêver d'une société rurale développée et intégrée à l'économie de marché, relève presque de l'utopie. Le constat d'échec des politiques publiques depuis l'indépendance du Maroc renforce ce pessimisme fortement partagé par les sociologues et les économistes. Ces derniers, s'ils s'accordent à souligner l'actualité des recherches du père de lasociologie rurale marocaine, constatent que, depuis la publication de son œuvre, le monde rural a quasiment fait du surplace. Pire, selon des notes internes au ministère de l'Agriculture, l'indice du développement humain dans le milieu rural, place le Maroc parmi les pays les moins avancés. Le verdict est sans appel. Que deviendra la société rurale dans le contexte des accords de libre échange? Est-il trop tard pour prendre le virage du développement, pour sauver ce qui peut l'être ?
Peu d'exploitations viables
Plantons le décor : la comparaison entre l'économie rurale des années 60 et celle d'aujourd'hui ne montre pas une évolution notable. “Par tête d'habitant, la production apparaît en quasi-stagnation. Entre 1999 et 2003, le produit agricole par tête a atteint 674 DH, soit à peine deux dirhams de plus que le niveau déjà atteint entre 1960 et 1964”, précise Najib Akesbi, grand spécialiste de l'économie rurale. Le même statu quo se vérifie pour la structure de la production agricole que les chercheurs répartissent en trois catégories : tout d'abord, les grandes exploitations (plus de 50 ha en bour et plus de 20 ha en irrigué). Elles représentent 2% de la superficie agricole exploitée, mais accaparent 22% des terres agricoles utiles et ont une viabilité économique due à la mobilisation de capitaux et l'abondance des systèmes d'irrigation.