1] Question de synthèse
Le corpus présenté comporte quatre extraits d'oeuvres de genres variés. Trois d'entre elles appartiennent à des auteurs classiques du XVII° siècle. L'extrait de l'oeuvre Clio de Charles Péguy, lui, date de 1932 et s'interroge sur les nouveaux visages du personnage de Tartuffe créé par Molière. Nous comparerons les caractéristiques de celuici dans l'extrait de la comédie éponyme de Molière avec celles du personnage de la fable de La Fontaine et avec le personnage d'Onuphre dont La Bruyère dresse le portrait. Tout d'abord, les trois auteurs mettent en avant l'attitude religieuse de leur personnage. En effet, Orgon, dans sa tirade, extraite de l'acte I, scène 5 de la comédie Tartuffe créée par Molière, précise par le complément de temps « chaque jour » (v.1)le zèle religieux du personnage évoqué également par le complément « ardeur » (v.4). De même, La Fontaine, dans sa fable intitulée « Le Rat qui s'est retiré du monde », présente le rat comme « un dévot personnage » (v.13) Enfin, La Bruyère, comme Molière, dans le portrait d'Onuphre extrait de l'oeuvre Les Caractères, met en avant le caractère ostentatoire de la dévotion du personnage notamment à partir de ses lectures édifiantes comme le montre le titre des oeuvres, par exemple, « le Chrétien intérieur » (l.15). Ce caractère ostentatoire rappelle le désir d'être vu des différents personnages. La Bruyère précise ainsi que « si [Onuphre] entre dans une église,il observe d'abord de qui il peut être vu »(l.2122). De même, Orgon indique que Tartuffe se place « visàvis de » lui (v.2) et agit toujours « à [ses] yeux » (v.16) même s'il n'en perçoit pas les implications. Ce caractère ostentatoire de la pratique religieuse se marque aussi dans l'excès du comportement. Orgon évoque les « grands élancements » de Tartuffe, ce qui révèle son absence de discrétion. De même, La Bruyère indique qu'Onuphre « pousse des élans et des soupirs » (v.27). Tous présentent également un apparent dénuement qui serait conforme à une volonté d'appliquer les préceptes religieux. Orgon souligne « [l']indigence » de Tartuffe (v.10), La Bruyère emploie une négation restrictive pour indiquer la sobriété de son lit (l.1) et le rat de La Fontaine se présente comme « un pauvre reclus »(v.26). Toutefois, tous les auteurs laissent transparaitre l'hypocrisie de ces personnages. Elle reste très implicite dans l'extrait de Molière qui se trouve au début de la comédie et présente donc un personnage d'Orgon comme complètement aveuglé par Tartuffe. Toutefois, le comportement de Tartuffe est visiblement adressé à Orgon comme le montre l'indication qu'il a été « instruit par son garçon » (v.9) de sa pauvreté. Les deux autres textes présentent une dénonciation plus nette. La Fontaine la prend en charge dans la morale avec ironie lorsqu'il suppose qu'un moine est toujours charitable » (v.35) ou plus implicitement lorsque le rat se retranche sous des motifs religieux pour refuser « quelque aumône légère » (v.15 et v.2728). Cependant, le plus explicite est La Bruyère qui déclare qu'Onuphre « veut passer pour ce qu'il n'est pas, pour un homme dévot » (l.1112).Les trois textes présentent donc des caractéristiques proches des personnages, ce qui fait de Tatuffe un type littéraire.
2] Commentaire : La Fontaine, Fables, « Le Rat qui s'est retiré du monde », livre VII, 3.
La Fontaine est un moraliste du XVII° siècle qui a créé de nombreux recueils de fables inspirées pour beaucoup de l'Antiquité gréco romaine, source traditionnelle des Classiques. Mais certaines ont une inspiration plus personnelle. C'est le cas de la fable intitulée « Le Rat qui s'est retiré du monde » qui ne constitue pas une réécriture d'Esope ou de Phèdre comme de nombreuses autres fables mais présente des allusions à l'époque contempraine. Cependant, nous verrons qu'elle véhicule un enseignement intemporel. Ainsi, nous verrons que ...