Eldorado
"L'herbe sera grasse, dit-il, et les arbres chargés de fruits. De l'or coulera au fond des ruisseaux, et des carrières de diamants à ciel ouvert réverbèreront les rayons du soleil. Les forêts frémiront de gibier et les lacs seront poissonneux. Tout sera doux là-bas. Et la vie passera comme une caresse. L'Eldorado, commandant. Ils l'avaient au fond des yeux. Ils l'ont voulu jusqu'à ce que leur embarcation se retourne. En cela ils ont été plus riches que vous et moi. Nous avons le fond de l'œil sec nous autres et nos vies sont lentes."
Ce roman de Laurent Gaudé date de 2007. A cette époque fort lointaine, Marie Le Pen n'était pas encore allée faire le tapin à Lampedusa. On n'avait pas encore entendu parlé de cette île dans les médias.
On a cru la découvrir suite aux révolutions récentes dans les pays du Magreb. On a cru que la Tunisie envoyait pour la première fois ses frêles embarcations couvertes de pauvres gens affamés sur les côtes d'Europe...
Ce livre raconte -entre autre- l'histoire de cette petite île, premier rocher de la "Citadelle" Europe, au large de la Sicile.
Ce livre raconte ce qu'est l'émigration : pourquoi les gens partent ? qu'espèrent-ils ? quels enjeux internationaux se cachent derrière ces bateaux vétustes abandonnés à la mer ? qui sont les passeurs et qui sont ceux qui sont près à donner tout ce qu'ils ont et à risquer leur vie pour passer ?
Le Capitaine d'une frégate qui admoneste les clandestins est le personnage principal de ce roman. Il sauve des vies pour les briser aussitôt. Pour renvoyer à la case départ ses désespérés qui ne peuvent pas faire autrement : partir, toujours, tenter encore et encore de rejoindre cet Eldorado. Et même si on leur dit, les yeux dans les yeux qu'en Europe, rien n'est à la hauteur de leur rêve, qu'ils seront toujours mis plus bas que terre, qu'ils avaient beau avoir étudié, là-bas, dans leur pays, ils ne seront jamais rien ici, ils ne veulent pas le croire. Rien ne pourra être pire que