Esclavage
« J’entends de la cale monter les malédictions enchainées, les hoquettements des mourants, le bruit d’un qu’on jette à la mer… les abois d’une femme en gésine… des raclements d’ongles cherchant des gorges… des ricanements de fouets… des farfouillis de vermine parmi des lassitudes. Le vaisseau négrier craque de toute part…son ventre se convulse et résonne… l’affreux ténia de sa cargaison ronge les boyaux fétides de l’étrange nourrisson des mers. En vain pour s’en distraire le capitaine pend à sa grand vergue le nègre le plus braillard ou le jette à la. Et ce pays cria pendant des siècles que nous sommes des bêtes brutes, que les pulsations de l’humanité s’arrêtent aux portes de la nègrerie… et l’on nous marquait au fer rouge et nous dormions dans nos excréments et l’on nous vendait sur les places et l’aune de drap anglais et la viande salée d’Irlande coutaient moins cher que nous, et ce pays était calme, tranquille, disant que l’esprit de Dieu était dans ses actes » voici un extrait particulièrement cru de l’ouvrage d’Aimé Césaire ; cahier d’un retour au pays natal. Voici ce qu’est l’horreur de la traite et de l’esclavage. Des hommes traités comme de la marchandise, arrachés à leur terre natale par des européens, et entassés à fond de cale des navires négriers, les membres entravés de lourdes chaines, ne recevant qu’une maigre bouillie afin qu’il ne dépérissent pas tout en demeurant trop faibles pour se révolter, il était monnaie courante que l’équipage abusait des femmes nègres durant la traversée. Un grand nombre de nègres ne résistaient pas à la traversée, si ce n’était pas la faim qui les emportait c’était le scorbut ou la folie, d’autres préféraient se suicider en se jetant du vaisseau et se laissaient couler. Une fois les cotes en vue les esclaves recevaient une ration alimentaire plus consistante pour leur donner meilleure mine, ils étaient lavés puis enduits d’huile pour rendre saillants