Ethique pour les nul
On sépare d’ordinaire les usages descriptifs et évaluatifs d’un mot. Mais cette différence est parfois difficile à établir. Lorsque l’on dit à un ami : « Ce que tu as fait était courageux », on décrit son action (elle se caractérise par du courage) en même temps qu’on l’évalue positivement.
Il y a bien sûr quantité de mots apparemment « neutres », c’est-à-dire qui ne renvoient pas, dans leur usage, à une louange ou à un blâme. C’est le cas du mot « pratique », très employé dans le langage ordinaire.
Comme nom commun, il désigne, entre autres, une activité, c’est-à-dire un ensemble d’actions coordonnées visant un certain résultat. Aristote affirmait que « toutes nos actions se rattachent nécessairement à sept causes diverses : le hasard, la contrainte, la nature, l’habitude, le calcul, la colère et le désir passionné » (La Rhétorique, I, 10, VIII). La pratique vise la réalisation d’une chose extérieure à nous (elle relève de la production, dont le résultat est par exemple l’œuvre de l’artiste), ce qui suppose le « calcul » (il faut choisir entre plusieurs manières de faire), l’« habitude » (une pratique est « une manière habituelle d’agir », dit le dictionnaire Robert à propos du sens dont il est question ici), parfois la « passion » au sens moderne d’un désir vif et constant.
Il y a un moyen simple de vérifier que le mot « pratique » est neutre : c’est de constater que, lorsqu’on évalue une pratique, on lui accole nécessairement une épithète. Celle-ci est souvent très générale. On se contente volontiers des