« Il est nécessaire à un prince, s’il veut se maintenir, d’apprendre à pouvoir n’être pas bon, et d’en user et n’user pas selon la nécessité ». Cette phrase tirée du chapitre XV du Prince de Machiavel est révélatrice de la pensée politique qu’il défend au début du XVIème siècle. Cet ancien fonctionnaire de la République florentine rompt totalement avec la pensée traditionnelle du Moyen Âge. Celle-ci se référant à la philosophie de Saint Augustin, soutenait l’importance pour l’Etat de se faire le soutien et le glaive de l’autorité spirituelle sous laquelle il était placé. Comment prendre le pouvoir et le conserver ? Telle est pour Machiavel la grande question politique, fil conducteur de sa pensée. L’Etat est réduit à des mécanismes de conquête et de conservation. La politique est d’abord un art d’apprendre à se maintenir au pouvoir dans une situation qui n’est pas close, qui n’est pas achevée, mais qui est en permanence susceptible de renversements. Machiavel parlait en son temps d’étude de « l’art de l’Etat ». Dans son œuvre d’un genre relativement simple, puisqu’il s’agit de conseils prodigués à un souverain, en l’occurrence Laurent de Médicis, Machiavel se veut pragmatique. Ce manuel comme on pourrait l’appeler tend vers la clarté et l’efficacité. Pour stabiliser l’Etat comme il le conceptualise, seul le gouvernant malléable par rapport à la cité qu’il dirige est en mesure de réaliser ce dessein. Et c’est pourquoi, le Prince de Machiavel procède à une translation du sens de la politique. Comment la politique comme étant l’art de bien gérer la cité, devient-elle pour Machiavel inéluctablement une lutte politicienne pour le politique qui n’a de cesse d’avoir comme objectif la conservation du pouvoir et la stabilité de l’Etat ? C’est par une rationalisation de la politique que l’auteur invite le prince à se conformer à la réalité de la cité en vue de l’aboutissement à un Etat uni, reflet de la supériorité de la valeur politique sur l’homme d’Etat.

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