Kant
Kant est connu pour avoir révolutionné la métaphysique dans la Critique de la raison pure, en abordant ses problèmes d'une manière nouvelle : il s'agit d'étudier la raison en elle-même, d'établir selon quels concepts fondamentaux elle fonctionne. Partant de là, tous les concepts qui sont formés ne proviennent non pas des choses-mêmes, mais du traitement rationnel qui unifie le divers des sensations. Les concepts a priori (causalité, unité multiplicité, etc.) visent à donner une forme aux représentations, mais ne peuvent pas servir à représenter l'absolu. La métaphysique théorique traditionnelle est donc radicalement critiquée. Kant est aussi célèbre pour avoir théorisé magistralement l'éthique, fondée sur l'idée que l'autre est la finalité de la raison pratique.
Mais on connaît moins Kant comme analyste de l'homme dans toutes ses composantes, qui a ouvert des chantiers monumentaux pour la pensée, et qui est précurseur des sciences humaines modernes. C'est ce dernier Kant, étonnant, stimulant, plein de génie, qui se fait jour dans Anthropologie d'un point de vue pragmatique.
La préface de l'ouvrage définit l'antropologie comme "une doctrine de la connaissance de l'homme, formulée de manière systématique" ; celle-ci pouvant être conçue d'un point de vue "physiologique" (c'est à dire vers l'exploration de la nature humaine) ou d'un point de vue pragmatique (c'est à dire, en tant que l'homme agit par liberté). L'anthropologie d'un point de vue pragmatique vise à un type de connaissance utilisable par l'homme, pour mieux établir ses finalités, et agir conformément à celles-ci. Mais cette connaissance ne va pas de soi, et rencontre des difficultés, que Kant soulève dès le départ. L'homme, s'il est observé par un autre, éprouve une gêne qui le porte à la dissimulation; l'homme s'il s'observe lui-même, vit une sorte de contradiction, car dans l'attitude d'observation, les mobiles de l'action sont au repos, de