La culture et le barbarisme
Allons cependant plus avant.
On va prendre comme fil conducteur le regard que porte la culture sur la barbarie, et parallèlement suivre les acceptions successives qu'a prises le mot barbare dans le cours de son élargissement sémantique, et découvrons où et jusqu'où il nous conduit.
D'un simple critère linguistique, le mot a pris rapidement une connotation péjorative, particulièrement par les Romains pour nommer tous les peuples qui se trouvent à l'extérieur du limes, dans le Barbaricum, la "terre des Barbares.
Il n'est que de se souvenir des cartes géographiques produites en Europe jusqu’au XVIe siècle désignaient le Maghreb sous le vocable de Barbarie. Le nom du peuple berbère a la même origine, et même l'espèce de canard originaire des Amériques fut dite canard de Barbarie !
Le barbare n'est donc plus celui dont on ne comprenait pas le langage, c'est maintenant celui qui ne partage pas nos valeurs instituées.
Une réciprocité se dessine en arrière plan de ce constat.
Lévi-Strauss signale à ce propos : "Le barbare, c'est d'abord l'homme qui croit à la barbarie".
Faisons maintenant une grande enjambée dans le temps : nous voici à Berlin en 1941. Le drapeau nazi flotte et a remplacé celui de l'éphémère république de Weimar.
Un auteur dramatique, Hanns Johst évoluant dans le cercle intime du Führer et des SS, produit une pièce de théâtre portant le nom d'un officier martyr. L'histoire a retenu cette pièce pour une réplique passée à la postérité :
«Quand j'entends le mot culture, j'enlève le cran de sûreté de mon browning !»
Nous voilà arrivés là à un point crucial, un point qui n'est pas