la culture populaire
Institut
d'études culturelles, Katholieke
Universiteit
Leuven
LA CULTURE POPULAIRE N'EXISTE PAS,
OU LES AMBIGUÏTÉS
DES CULTURAL STUDIES
Dans l'index de nombreux livres contemporains sur les «études culturelles» ou Cultural Studies1, on cherchera en vain, entre politique et postmoderne, un terme comme populaire. Cette omission paraît d'autant plus singulière que le champ des études culturelles a, jusqu'à nos jours, des liens très forts, historiques aussi bien que théoriques, avec l'étude, voire la défense de la culture populaire (au sens non folklorique du terme). Et pourtant ce silence s'explique: si le sens (globalement positif) de «populaire» n'a pas radicalement changé, ni au fond l'attitude (également positive) des études culturelles à l'égard de la culture populaire, le mot même (et partant la chose, suppose-t-on) se voit concurrencé de plus en plus par un grand nombre de termes qui correspondent mieux à la démarche récente, postmoderne et multiculturelle, des Cultural Studies. Quant au « peuple » (qui n'est pas the people, nettement moins marqué sociologiquement et politiquement), il est toujours apparu dans les études culturelles sous le parapluie du concept de «culture populaire». Pour cette raison, la présente étude se focalisera essentiellement sur l'adjectif «populaire» plutôt que sur le substantif «peuple».
La culture populaire n'existe pas...
Nées en Grande-Bretagne dans les années 1950 dans le sillage de la démocratisation émergente de l'enseignement, les études culturelles ont redéfini radicalement notre conception de la culture. Au lieu
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HERMÈS 42, 2005
La culture populaire n'existe pas, ou les ambiguïtés des Cultural Studies
de limiter la culture aux goûts de l'homme cultivé (c'est la célèbre définition de Mathew Arnold, lequel ne fait du reste que prolonger une longue lignée d'auteurs et d'artistes opposant ce que lui nomme culture et anarchie: «le meilleur de ce que l'on a pensé et de