la régulation de la connaissance
2010
Economie de la connaissance : de quoi parle-t-on ?1
Comme le souligne Thomas Paris, les contributions ici rassemblées montrent surtout la diversité des facettes de l’« économie de la connaissance » et, simultanément, la difficulté à cerner de manière précise cette notion. Pourtant, à aucun moment, les intervenants ne semblent mettre en doute le fait que la réalité empirique (partielle) qu’ils décrivent - que ce soit sous l’angle de l’innovation dans l’entreprise, des relations entre sciences, techniques et marchés, ou du territoire - fait partie d’un nouveau monde (global), qui dessine une société et une économie profondément différente de celles qui l’ont précédé. Comment comprendre ce paradoxe d’une nouveauté qui à la fois s’impose comme une évidence et semble cependant se refuser à une caractérisation claire et nette ?
Une explication possible pourrait être la difficulté conceptuelle à s’extraire d’une réalité englobante et multiforme pour saisir les changements véritablement paradigmatiques. Sans exclure tout à fait cette hypothèse, je voudrais en proposer une autre, qui est la suivante : rien de fondamental, dans l’économie de la connaissance, n’est vraiment nouveau ; rien, sauf les intensités et les interactions de processus, qui, pris séparément, sont vieux comme le monde mais qui recomposent ensemble une configuration inédite2. Le premier point explique la difficulté à cerner de façon spécifique et différenciée la nouveauté ; le second explique le sentiment puissant de radicalité des changements.
La formulation la plus précise, à mon sens, des fondements de l’économie de la connaissance est celle qu’en donnent les économistes eux-mêmes, dans la lignée des travaux fondateurs de Romer et Lucas notamment, et des théories de la croissance endogène3. Sur quoi reposent ces théories ? Très schématiquement, sur quelques conceptions très simples : le « progrès technique » n’est pas exogène, tombé du ciel en quelque sorte, comme dans les