L'axolot et le mythe scientifique
LITTÉRAIRE
Jean-Bruno Renard
De Boeck Supérieur | « Sociétés »
2010/2 n° 108 | pages 19 à 32 ISSN 0765-3697
ISBN 9782804161569
DOI 10.3917/soc.108.0019
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/revue-societes-2010-2-page-19.htm
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L’archaïsme se traduit aussi par la monstruosité attribuée à l’axolotl : qu’il s’agisse de sa laideur pour la tradition populaire (« laid comme un axolotl », disent les Mexicains) ou bien des anomalies consécutives à des régénérations ou à des mutations, selon les scientifiques. Du point de vue de l’évolution biologique, l’axo- lotl est considéré soit comme « le plus imparfait, le plus dégradé de tous les amphi- biens » 17, soit comme un « échec métamorphique » ou une « régression évolutive » du fait de sa fixation à l’état larvaire. La notion même de « larve » renvoie au sym- bolisme de l’inachevé, de l’imparfait, du laid et du …afficher plus de contenu…
On a d’abord hésité à le classer parmi les poissons ou parmi les amphibiens, puis on a discuté de sa place parmi les amphibiens ayant acquis leur forme définitive ou encore à l’état larvaire.
La découverte de sa néoténie a fait de lui un animal paradoxal qui peut se repro- duire à l’état larvaire.
L’anthropologue Mary Douglas 19 a montré que les animaux perçus comme inclassables dans une culture – par exemple le porc chez les Hébreux, parce qu’il a les pieds fendus mais ne rumine pas, ou le pangolin chez les Lele d’Afrique, parce qu’il vit sur terre mais possède des écailles comme un poisson – se voient néces- sairement investis d’une charge symbolique qui donne lieu à des dévalorisations ou à des valorisations.
La possible