Le besoin de philosophie
Il y a un paradoxe lorsqu’on parle de «besoin philosophique». En effet, le besoin semble relever de la nature (besoin de manger, de dormir, de procréer), il semble être vital, nécessaire pour la survie de tout un chacun. On satisfait ses besoins pour vivre. Par opposition la philosophie serait «un luxe de l’entendement», selon l’expression de Kant. Elle ne serait pas du registre de la nécessité. Il y a par ailleurs un redoublement dans cette formule car, étymologiquement, la philosophie est déjà désir de sagesse. Ou est-ce encore dans un autre sens qu’il faut prendre la philosophie quand on la rapproche de la notion de besoin? Autrement dit, il faut préciser ce que l’on entend par philosophie. De même il faudra préciser ce que l’on entend par besoin. S’agit-il d’un besoin déterminé qui vise la philosophie comme telle ? Ou bien est-ce un besoin qui vise quelque chose d’indéterminé à quoi la philosophie prétendrait apporter satisfaction ? Quelle est nature de ce besoin? D’où procède t-il ? En quoi la philosophie apporte t-elle satisfaction ?
I- BESOIN ET MANQUE
Comment expérimente t-on ce besoin ? Le besoin est un manque, une privation. Ainsi j’ai soif -> je bois. Par exemple dans le Philebe, Platon analyse le besoin comme articulé à une satisfaction. Besoin = vacuité/réplétion. Nous cherchons à assurer nos besoins vitaux. Quand on parle de «besoin de philosophie», de quel besoin parle t-on ? Un besoin de «sens». Les gens pourraient dire «on se rend bien compte qu’une existence dans laquelle on se consacrerait à satisfaire ses besoins vitaux serait bien élémentaire». L’homme aurait alors un besoin vague, indéterminé, ou encore un malaise.
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NB : le mot anglais pour dire «malaise» est, chez Locke, «uneasiness». Terme que Coste (traducteur de Locke) traduit par «inquiétude», càd cette incapacité à rester au repos (au sens augustinien du terme).