Le bilan du workfare
Le RSA de Martin Hirsch n’est que l’exemple le plus récent des politiques du « workfare », autrement dit des mesures visant à « activer » les politiques sociales. Depuis quinze ans, ces politiques ont été adoptées aux Etats-Unis et dans plusieurs pays européens. Avec quel résultat ? Selon le sociologue Jean-Claude Barbier, les promesses de réduction des inégalités ou de lutte contre la pauvreté n’ont pas été tenues.
Par Jean-Claude Barbier ; sociologue, directeur de recherche au CNRS, auteur de La Longue Marche vers l'Europe sociale, PUF, 2008. (Photo : D.R.)
Texte paru le 4 novembre 2008 dans la revue laviedesidees.fr, repris avec l'autorisation de l'auteur.
En 1988, le RMI est voté à l'Assemblée nationale à l'unanimité. En 1992, il est reconduit. En 1995, un débat est lancé en France à propos du workfare. Le mot américain se répand dans l'analyse sociologique et économique. Il a été introduit dans le débat français par Pierre Rosanvallon dans La Nouvelle Question sociale (1995). À y regarder de près, on s'aperçoit que le mot est employé de façon si diverse qu'on ne sait plus trop de quoi on parle en France et à l'étranger. Pourtant, des réformes qui se ressemblent sont engagées, depuis la fin des années 1980, dans certains pays, depuis le milieu des années 1990 dans d'autres. Il n'est donc pas incohérent de les comparer entre elles. Le mot d'activation a souvent été utilisé pour les décrire, les louer ou les critiquer. Il faut donc empiriquement s'enquérir de savoir si l'activation affichée par les politiques et les réformes est la même partout, ce qui suppose la définition rigoureuse des notions de workfare et d'activation. En 2008, il y a près de quinze ans que l'on parle d'activation et de workfare et que les gouvernements mettent en œuvre des réformes qui assurent promouvoir l'une ou l'autre de leurs variantes. Il est donc légitime de chercher à comprendre ce que ces réformes ont changé dans les principaux pays