Le poupon
« Ecrire une satire sur un élément de votre enfance. Vous critiquerez cet élément avec votre regard d'adolescent ayant aujourd'hui gagné en maturité »
J'ai été maman, et je ne le suis plus. Je n'étais peut-etre pas considérée comme une vraie mère, semblable à toutes, mais dans mon monde à moi, j'étais l'une des meilleure maman qu'un poupon puisse avoir. Assise sur ma chaise, au milieu du bal des passants venu offrir une nouvelle vie aux objets, je regardais nostalgique, mes vieux jouets un peu désuets certes, mais gorgés de souvenirs... Mon regard se posa sur mon poupon, celui que j'ai longtemps regardé comme mon enfant. Je me souvins alors des longs moments que je passait à vêtir cet être en plastique avec une minutie maniaque, à le couvrir l'hiver, le protéger du soleil l'été, lui chanter des chansons absurdes pour qu'il s'endorme... Ce poupon a occupé une grande partie de mon temps libre, je le chérissais, l'aimais, et lui souhaitais un grand avenir, j'étais ridicule. Je ne me souviens pas pourquoi je l'affectionnais tant. Il était là, immobile, non-expressif, las, froid. Je me souviens lui avoir parlé des heures entières et lui avoir raconté mes plus grands secrets. J'attendais risiblement qu'il me réponde, je crois que le pire, c'est que si ce poupard avait pu prononcé un piètre mot, j'aurais laissé de côté ma pauvre petite lucidité de l'époque, pour l'écouter et lui obéir au doigt et à l'oeil. Je crois que je l'aimais vraiment, l'amour que je portais à ce mioche en plastique était caricatural. Je l'aimais comme un ami ; c'était mon ami. Désormais mon amie est à la vent. Bien que ce jouet me rappel des souvenirs d'enfance, l'idée de ne plus cet objet auquel je tenais tant étant jeune ne me rend pas triste.
J'ai été maman mais je ne le suis plus.