Le vieux qui lisait des romans d amours
LUIS SEPÚLVEDA
LE VIEUX QUI LISAIT
DES ROMANS D’AMOUR Traduit de l’espagnol (Chili) par François Maspero
Éditions Métailié
TITRE ORIGINAL
Un viejo que leía novelas de amor
© by Luis Sepûlveda, by arrangement with Dr Ray-GIIde Mertin, Literarische Agentur
ISBN 978-2-02-023930-1
(ISBN 2-86424-127-7, 1° publication brochée
ISBN 2-02-020116— X, 1° publication poche) pour la traduction française
© Éditions Métailié, 1992.
Présentation
Le vieil …afficher plus de contenu…
Il aurait fallu faire ce que l’on pratique ordinairement pour tout individu qui meurt en forêt et que d’absurdes dispositions juridiques interdisent d’abandonner dans une clairière : inciser largement le corps du cou à l’aine, le vider de ses viscères et le remplir de sel. C’était la seule manière de le garder présentable jusqu’à la fin du voyage. Mais cette fois il s’agissait d’un damné gringo, il fallait donc le trimbaler intact, avec les vers qui lui bouffaient l’intérieur, et au débarquement il ne serait plus qu’un sac d’humeurs pestilentielles.
Assis sur les bonbonnes de gaz, le dentiste et le vieux regardaient couler le fleuve. De temps en temps, ils se passaient la bouteille de …afficher plus de contenu…
C’étaient les Shuars qui, pris de pitié, s’approchaient pour leur tendre la main.
Ils apprirent d’eux à chasser, à pêcher, à construire des cabanes qui résistent aux tempêtes, à distinguer les fruits comestibles des vénéneux ; et surtout, ils apprirent l’art de vivre avec la forêt.
Quand la saison des pluies fut passée, les Shuars les aidèrent à défricher les pentes de la montagne, tout en les prévenant que c’était un travail sans espoir.Malgré les avertissements des indigènes, ils semèrent les