Marianne et les colonies, gilles manceron
Les partisans de l’expansion coloniale comprennent très vite que c’est grâce aux images, aux récits, etc… qu’ils parviendront à montrer la supériorité de la race blanche, sans avoir recours à des discours. La dérision est également une arme redoutable pour susciter l’adhésion de son auditoire. En effet, faire rire des sauvages vaut mieux que toutes les démonstrations sur l’inégalité des races humaines. C’est ainsi que les expositions universelles connaissent un grand succès populaire, comme celle de Paris en 1889, où des « villages de nègres » ont été reconstitués sur le champ de Mars. On les retrouve également dans les spectacles, au cirque, dans la littérature enfantine (cf : romans de Jules Verne), dans la chanson populaire… A partir de 1889 et jusqu’à la fin de la IIIe République, l’exhibition du sauvage va devenir une attraction obligée de toute foire et de toute exposition coloniale. Les « villages nègres » se multiplient dans toute la France et la grande Exposition coloniale de 1931 marque une certaine apothéose coloniale, en même temps que la fin d’une époque. Lors de cette Exposition, un groupe de Canaques parfaitement francophone et scolarisé, sera présenté comme une troupe de cannibales. La force de ces exhibitions est qu’elles n’assènent aucun discours, mais ont un fort impact dans la construction d’une image du « sauvage ». Elles amènent en effet le spectateur à observer par lui-même, et donc à croire qu’il se forge sa propre opinion. De plus, la théorie de la hiérarchie des races, votée par la Chambre en 1885, connaît une consécration grandissante. Cette idée est reprise par Ernest Renan, qui pose des groupes naturels, déterminés par la race, l’histoire et la volonté des populations de vouloir vivre ensemble. Donc il défend le libre choix des nationalités et s’oppose ainsi au droit de conquête. Pour autant, s’il refuse le racisme biologique énoncé par Gobineau, il considère