la COQUETTERIE
et le paraître
dans
l'île des esclaves.
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L'ILE DES ESCLAVES SHOW
présenté par Caroline.
MESDAMES ET MesSIEURS !
Bienvenue à L'ILE DES ESCLAVES SHOW :
Votre émission préférée
sur canal intello
spécial français
créé pour vous les lycéens.
Aujourd'hui nous nous intéresserons à une œuvre deMarivaux :
L'Ile des esclaves
où l'on retrouve l'importance
de la coquetterie et du paraître au XVIIIème siècle.
Ainsi que le renversement
entre le monde des maîtres et des valets
aboutissant à la mise en place de masques et de déguisements
qui finissent par entraîner le jeu de l'être et du paraître.
Notre étude comportera plusieurs parties
dont chaque invité surpriseénoncera le contenu
selon sa méthode et l’intérêt porté au sujet.
Tout d'abord notre première invitée :
une psychanalyste très intéressée par le sujet :
Fanny.
Bonjour Caroline,
je vais donc vous énoncer ma partie comme convenu,
pour cela je vais vous lire un passage de L'Ile des esclaves
situé au début de l'œuvre, précisément à la scèneIII.
La pièce se situe sur l'île des esclaves
où les rôles entre maîtres et valets sont inversés
par le chef de l'île nommé Trivelin,
et l'intrigue en est arrivée
au portrait d' Euphrosine, une ancienne maîtresse,
par Cléanthis, son ancienne esclave devenue maintenant maîtresse.
Extrait de l'œuvre :
Cléanthis : Enquoi ? partout, à toute heure, en tout lieu ; je vous ai dit de m'interroger ; mais par où commencer, je n'en sais rien, je m'y perds ; il y a tant de choses, j'en ai tant vu, tant remarqué de toutes les espèces, que cela me brouille. Madame se tait, Madame parle ; elle regarde, elle est triste, elle est gaie : silence, discours, regards, tristesse et joie, c'est tout un, il n'y a que la couleurde différente ; c'est vanité muette contente ou fâchée ; c'est coquetterie babillarde, jalouse ou curieuse ; c'est Madame, toujours vaine ou coquette l'un après l'autre, ou tous les deux à la fois : voilà ce que c'est, voilà par où je débute, rien que cela.
Euphrosine : Je n'y saurais tenir.
Trivelin : Attendez donc, ce n'est qu'un début.
Cléanthis : Madamese lève ; a-t-elle bien dormi, le sommeil l'a-t-il rendue belle, se sent-elle du vif, du sémillant dans les yeux ? vite sur les armes, la journée sera glorieuse : Qu'on m'habille ! Madame verra du monde aujourd'hui ; elle ira aux spectacles, aux promenades, aux assemblées ; son visage peut se manifester, peut soutenir le grand jour, il fera plaisir à voir, il n'y a qu'à le promener hardiment, ilest en état, il n'y a rien à craindre.
Trivelin à Euphrosine : Elle développe assez bien cela.
Cléanthis : Madame, au contraire, a-t-elle mal reposé ? Ah ! qu'on m'apporte un miroir ! comme me voilà faite ! que je suis mal bâtie ! Cependant on se mire, on éprouve son visage de toutes les façons, rien ne réussit ; des yeux battus, un teint fatigué ; voila qui est fini, ilfaut envelopper ce visage-là, nous n'aurons que du négligé, Madame ne verra personne aujourd'hui, pas même le jour, si elle peut ; du moins fera-t-il sombre dans la chambre. Cependant il vient compagnie, on entre : que va-t-on penser du visage de Madame ? on croira qu'elle enlaidit : donnera-t-elle ce plaisir-là à ses bonnes amies ? Non, il y a remède à tout : vous allez voir. Comment vousportez-vous Madame ? Très mal, Madame : j'ai perdu le sommeil ; il y a huit jours que je n'ai fermé l'œil ; je n'ose pas me montrer, je fais peur. Et cela veut dire : Messieurs, figurez-vous que ce n'est point moi, au moins ; ne me jugez pas aujourd'hui ; attendez que j'aie dormi. J’entendais tout cela, moi ; car nous autres esclaves, nous sommes doués contre nos maîtres d'une pénétration... Oh ! ce...