Momo doc
Le journalisme français a toujours été plus un journalisme d’expression qu’un journalisme d’observation : il accorde la préférence à la chronique et au commentaire sur le compte-rendu et le reportage. Autant qu’à la présentation des faits, il s’est toujours intéressé à l’exposé des idées ; autant qu’à l’analyse des situations, il s’est attaché à la critique des intentions. Par là, il est fondamentalement différent du journalisme factuel anglo-saxon selon lequel la nouvelle doit être nettement séparée de son commentaire, et du journalisme analytique, quasi pédagogique, allemand, plus préoccupé de traiter des sujets que de décrire des faits. On peut s’interroger à ce sujet sur la règle du journalisme anglo-saxon, "les faits sont sacrés, le commentaire est libre" ; souvent cité par les journalistes français, ce principe est bien rarement respecté car il est, en réalité, à l’opposé des traditions du journalisme français, et sans doute aussi des attentes de leurs lecteurs. Depuis la fin de l’Ancien Régime, les journalistes français assimilent la liberté de la presse à la liberté d’expression et se sont assez peu préoccupés de la liberté d’investigation ou d’accès aux sources.
Parmi les raisons qui peuvent expliquer ce goût naturel du journalisme français pour le jugement et l’analyse subjective et son relatif mépris pour le témoignage "objectif" du reportage, on peut en retenir deux.
La première tient à ce que l’on peut appeler l’ambition littéraire des journalistes, qui se sont longtemps considérés plus comme des hommes de lettres en devenir que comme des observateurs des événements ; de fait, la partie culturelle et les œuvres de fiction dans le contenu des journaux ont toujours été en France relativement importantes par rapport aux articles d’actualité.
La seconde tient à l’histoire : la presse française jusqu’à l’avènement de la IIIe République, a été soumise à une forte contrainte des autorités gouvernementales et