On ne badine pas avec l'amour, commentaire
Une scène dans laquelle un ou des personnages (se) « jouent la comédie » est un ressort dramatique efficace. Molière dans Le Malade imaginaire, Beaumarchais dans Le Barbier de Séville, Hugo dans Ruy Blas ont eu recours à ce procédé, que Musset reprend dans On ne badine pas avec l'amour. Perdican aime Camille, mais celle-ci, sous l'influence des religieuses qui l'ont élevée, le repousse. Pour se venger, il badine avec une jeune paysanne, Rosette, alors qu'il sait que Camille, cachée, l'entend. La tension dramatique est alors à son comble : Perdican se joue de Rosette et n'épargne pas ses efforts pour la persuader de l'aimer, mais ses paroles prennent un double sens, donnant à ce jeu une résonance pathétique.
I. Une mise en scène destinée à impressionner une jeune paysanne
Rosette a tout lieu d'être surprise de la déclaration d'amour de Perdican : un jeune noble cultivé ne saurait prêter attention à une pauvre paysanne. Perdican doit donc se montrer un fin stratège.
1. Une mise en scène ancrée dans le concret
Comme il a affaire à une jeune fille simple, Perdican entoure sa déclaration d'une mise en scène ancrée dans le concret, comme en témoignent les didascalies.
Il recourt au langage des objets et à des gestes symboliques. Le don de la chaîne concrétise les liens qui l'uniront à Rosette ; il s'accompagne du geste qui engage (« Il lui pose sa chaîne sur le cou ») et du vocabulaire du monde paysan (« gage » d'amour, « part de [...] vie nouvelle », « donner » son cœur). Symboliques sont aussi la « bague » (signe d'alliance) et le geste de la jeter dans l'eau (signe de rupture définitive avec Camille).
Les gestes au bord de la fontaine et la description de leurs effets sur l'eau sont assortis de mots à double sens (propre et figuré, concret et abstrait), chargés d'implicite mais transparents. Ils font référence à l'effacement de Camille dans le cœur de Perdican et au calme apaisant de la « vie nouvelle » avec Rosette : « regarde tout cela s'effacer