Parfum exotique
Quand, les deux yeux fermés, en un soir chaud d'automne,Je respire l'odeur de ton sein chaleureux,Je vois se dérouler des rivages heureuxQu'éblouissent les feux d'un soleil monotone; Une île paresseuse où la nature donneDes arbres singuliers et des fruits savoureux;Des hommes dont le corps est mince et vigoureux,Et des femmes dont l’œil par sa franchise étonne. Guidé par ton odeur vers de charmants climats,Je vois un port rempli de voiles et de mâtsEncor tout fatigués par la vague marine, Pendant que le parfum des verts tamariniers,Qui circule dans l'air et m'enfle la narine,Se mêle dans mon âme au chant des mariniers. Les Fleurs du mal, Charles Baudelaire Quelle image de la femme et de l'amour ce texte propose-t-il ?
De la femme et de l'amour, ce texte propose une vision à la fois voluptueuse, sensuelle ; et immatérielle, spirituelle.
Sensuelle et voluptueuse, tout d'abord, car Baudelaire nous invite dans son poème et dans son île paradisiaque grâce à l'odeur qu'exhale sa chaleureuse maîtresse. On imagine sa peau mâte et brûlante, son parfum lourd et capiteux. La lecture de ce poème requiert l'usage des cinq sens : la vue (« je vois se dérouler des rivages heureux », « je vois un port rempli de rivages et de mâts ») ; l'ouïe (« Se mêle dans mon âme au chant des mariniers ») ; l'odorat (« l'odeur de ton sein chaleureux », « guidé par ton odeur vers de charmants climats », « pendant que le parfum des verts tamariniers qui circule dans l'air et m'enfle la narine ») ; le toucher (« je respire l'odeur de ton sein chaleureux ») et le goût (« des arbres singuliers et des fruits savoureux »).
Et c'est cette sensualité exotique et accueillante, cette intimité rassurante et suave qui nous fait glisser du sensuel au spirituel. La présence de cette femme ou les sentiments amoureux qu'elle inspire, sont propices aux rêveries, et l'île n'est décrite que par des termes mélioratifs (2ème strophe), comme si le