Philo
Je ne peux pas ne pas tenir pour vraie l'affirmation «Je suis », car même si je le voulais, j'affirmerais encore par là que «je suis» celui qui veut. Deux caractères déterminent donc l'évidence cartésienne : la clarté de l'objet pensé (le fait qu'il soit directement présent, lui et pas un autre, sans obscurité) et la distinction, l'absence de confusion de cet objet avec d'autres objets. Une telle évidence, critère de vérité, n'est pas une donnée première, mais une saisie à la fois immédiate (sans intermédiaire entre le sujet connaissant et l'objet connu) et conquise, une évidence qui conclut une démarche rationnelle. Selon Descartes, les idées vraies sont toutes claires et distinctes et, inversement, ces dernières s'imposent à l'esprit comme évidentes. Exemple : les vérités mathématiques ou les principes logiques (comme le principe de non-contradiction) : au moment où je les pense, claires et distinctes, ces idées m'apparaissent comme ne pouvant être autres qu'elles ne sont, et même le malin génie que j'imagine n'y change rien (cf. Méditations, III, § 4). L'enchaînement logique de deux idées n'est lui-même saisi comme valable qu'à travers une intuition qui en perçoit l'évidence. L'évidence est décidément centrale, qui découvre aussi la valeur de vérité des démonstrations. La philosophie, les sciences, toute connaissance n'est donc vraie que pour un esprit qui perçoit avec une certaine évidence, définie par Descartes, chacune de leurs idées et chacun des liens logiques entre ces idées. On voit que l'évidence cartésienne, loin d'être source de préjugé, est