Pour une approche moderne de la traduction
On connaît la formule d'Umberto Eco : « la langue de l'Europe, c'est la traduction ». Il est tout aussi juste de dire que la traduction est également la langue de la mondialisation : l'anglais n'est plus la langue dominante sur Internet, et le sera de moins en moins (Graddol, 2007), confirmant ainsi la politique actuelle de la France qui table sur le plurilinguisme, de même que l'Union européenne. Pourtant, un profond clivage sépare les langues anciennes des langues modernes dans l'enseignement secondaire dans notre pays : seules les premières apprennent encore aux élèves à traduire de manière approfondie. C'est le constat que font Pascal Charvet et Patrice Soler dans leur Guide pédagogique du professeur pour l'enseignement des langues anciennes en collège et lycée :
L'activité de traduction ne concerne aujourd'hui dans notre enseignement que fort peu d'élèves. Ce constat malheureusement fondé intervient à un moment où plus que jamais les langues anciennes offrent une rencontre de l'Autre, une épreuve de l'étranger indispensable à l'identité du futur citoyen. La classe de grec ou de latin reste le premier atelier des échanges interculturels. Pour que l'apprentissage du latin et du grec puisse à la fois favoriser la constitution d'un socle culturel commun à tous les pays d'Europe et la découverte par les élèves de l'altérité, il est nécessaire de refonder une véritable pratique de la traduction scolaire.
(Charvet et Soler, 2005)
La situation est radicalement différente dans le supérieur. Pourquoi un tel décalage, pédagogiquement désastreux pour ceux qui, fort nombreux, se retrouvent brutalement au contact de la traduction une fois franchi le cap de l'enseignement secondaire ?
La réponse est simple : en raison d'une certaine vision de la traduction, qui voudrait qu'elle soit un frein à l'apprentissage des langues vivantes. La traduction n'a alors véritablement de vertus pédagogiques que dans le cadre des langues anciennes, que l'on qualifiait