Poétique de jaccottet
Ce sont des recueils marqués par une expérience intime de la mort et de la dépossession que Philippe Jaccottet nous donne à lire avec «Leçons», «Chants d’en bas» et «A la lumière d’hiver». Ils sont façonnés par le deuil et la souffrance, mais constituent également des lieux où la parole poétique est incessamment remise en question et où s’exprime le besoin d’une réécriture constante. Poète de la transparence continuellement en quête d’une parole juste, il nous offre ici des poèmes qui font échos à sa vie, qui nous laissent entrevoir des bribes de son existence. Nous pouvons donc légitimement nous demander si la poésie n’est pas un voyage intérieur sans cesse réitéré. Intrinsèquement liée à la vie, la poésie paraît être le reflet de l’âme, un voyage intérieur dont la parole fait acte en tentant de se placer au plus près du réel. Mais cette expression de l'intériorité piège le poète dans un recommencement vain, car perpétuel, et exprime l’impuissance des mots qui semblent tourner à vide sur eux mêmes.
Pour Philippe Jaccottet, la poésie, et l’oeuvre en général, est consubstantielle à la vie; elle ne saurait s’en détacher puisqu’elle en découle. Ainsi, la poésie se présente comme un voyage intérieur à la découverte de soi. En effet, les recueils «Leçons», «Chants d’en bas» et «A la lumière d’hiver», se subliment en véritables miroirs reflétant les sentiments du poète. Alors que le recueil «Air», écrit entre 1961 et 1964, chante les éléments du monde et donne l’impression que Jaccottet a franchi une étape, «Leçons», achevé en 1967, s’inspire de la mort et de la souffrance de la perte. Ce changement fulgurant s’explique aisément par la mort de Louis Haestler, son beau père, comme il