Pratiques alimentaires
Apprendre à manger ou comment modeler les pratiques alimentaires des jeunes ?
Dominique Lassarre Aurélie Accabat
Manger est un des comportements les plus naturels et les plus primaires. Pourtant on a l’impression, depuis quelques décennies, que cette conduite relève de compétences très élaborées qui font l’objet de programmes éducatifs indispensables au risque de mettre en danger son bien-être, sa santé, sa survie, celle de l’espèce humaine et celle de la planète. Un phénomène nouveau ? Certainement pas, l’acte alimentaire est trop codifié, et depuis longtemps, au sein de chaque société avec ses recommandations et ses interdits, pour affirmer que la préoccupation soit nouvelle. En 1890, La cuisine à l’usage des ménages bourgeois et des petits ménages du Baron Brissé est augmentée de deux nouveaux chapitres : « Menus et recettes nouvelles de table et d’hygiène » et « Régime culinaire à suivre contre l’obésité ». Comme d’autres risques sanitaires, l’obésité est fortement connotée à un mode de vie moralement répréhensible. « Riches gourmands et oisifs, qui vous nourrissez trop bien et qui abusez des mets les plus exquis et les plus succulents, et de liqueurs les plus spiritueuses, et qui dédaignez toute espèce d’exercice, comme si les jambes qui vous étaient accordées par la nature étaient un frivole ornement, n’oubliez pas que l’obésité est une suite fréquente de l’oisiveté et de la bonne chère » (Dr Maccarry cité par Baron Brissé, p. 335). Aujourd’hui, l’obésité est considérée comme une menace dans les sociétés occidentales. Dans une enquête nationale (IRSN, 2005), 64 % des Français estiment que « l’obésité des jeunes » (l’item du questionnaire est ainsi libellé) est un risque élevé. Selon les sources, le phénomène toucherait entre 3 % et 18 % de la popula-
Dominique Lassarre et Aurélie Accabat, psychologie sociale et environnementale, CUFR de Nîmes.
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Faut-il prévenir… ? - la lettre de l’enfance et de l’adolescence n° 65
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