Propriété et pouvoir de l’entreprise
L'historien Alfred Chandler, dans La main visible des managers (The Visible Hand : The Managerial Revolution in American Business, 1977), montre qu'à la fin du XIXe/début du XXe siècle, au moment où se développent des innovations dans des secteurs comme la chimie, le pétrole, l'électricité ou l'automobile, apparaît la très grande firme. A cette période, on constate l'explosion des fusions-acquisitions. John Davison Rockefeller, le célèbre magnat du pétrole et créateur de la Standard Oil, après avoir réalisé une concentration horizontale presque parfaite de l'industrie du raffinage, travailla à la concentration verticale de son industrie, en englobant toutes les phases de la production : de l'extraction au commerce de détail en passant par le transport, la fabrication de barils, les pipelines ou la recherche scientifique et le marketing. Selon Chandler, cette concentration va de paire avec une transformation juridique de l'entreprise. Les marchés financiers, la bourse notamment, permette de diversifier les apports en capital et satisfait les besoins grandissant en financement de l'industrie. De ce fait, les entreprises grossissent. Leur structure organisationnelle évolue : elle passe d'une forme unitaire hiérarchique à une forme multidivisionnelle faisant appel à toute une classe nouvelle de travailleur : les managers. Cette concentration des entreprises aboutit ainsi à une séparation entre propriété de l'entreprise et contrôle de l'entreprise. Le pouvoir quitte progressivement les mains de l'investisseur d'origine. En fusionnant toute les raffineries de pétrole, Rockefeller a besoin de faire appel à des agents formés pour l'aider à administrer son empire industriel. Or ces managers ont comme nouvelle caractéristique de ne pas être les propriétaires du capital. Une hiérarchie