Savoir faire

14328 mots 58 pages
Yann Mouton

« Il y a donc une profession de foi purement civile » : tel est l’énoncé emblématique du chapitre intitulé « De la religion civile » sur lequel, juste avant une courte conclusion, s’achève Du contrat social. C’est là, à coup sûr, un énoncé dont on ne peut contester à Rousseau la paternité. Il porte en effet toutes les marques de son style. Outre l’évocation d’une « profession de foi », le paradoxe qui consiste à la qualifier de « purement civile » fait partie des procédés habituels de Rousseau, ainsi que l’usage de l’adverbe « purement » qui témoigne de son goût pour les formules précises et, au sens strict, radicales. Le « donc », on y reviendra, est ici loin d’être indifférent. Il porte toute la complexité du statut de la discursivité et de la rationalité chez Rousseau. On pense à l’étonnant «donc» inaugural de la première Promenade des Rêveries du promeneur solitaire : « Me voici donc seul. » Le paradoxe est pourtant que le chapitre sur la religion civile, dont cet énoncé pourrait être un autre titre, ne semble pas facilement conciliable avec l’entreprise générale de Du contrat social auquel il a été pourtant, on y reviendra aussi, tardivement et donc très résolument ajouté. Cette ultime proposition semble, en effet, peu compatible avec un texte connu pour accomplir une rupture définitive entre le champ de la théologie et celui de la politique, et pour mettre en œuvre le concept de souveraineté dans des termes qui en appellent explicitement à l’autonomie et à la rationalité. La diversité du commentaire est à la hauteur de la difficulté. Faut-il par exemple en conclure que l’édifice repose finalement sur une proposition d’inspiration religieuse2 ? Devrions-nous plutôt n’y voir qu’une concession à l’esprit du temps et plus particulièrement sur la question, à l’époque inévitable, de la tolérance ? Mais pouvons-nous alors en conclure une soumission du politique au religieux ou bien exactement l’inverse ? Faut-il enfin plus gravement y voir l’aveu d’un

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