Sur le ravissement de lol v stein de duras
Laure Himy-Piéri
Université de Caen Basse-Normandie lhimy@wanadoo.fr
Résumé : Cet article se propose de montrer comment l’écriture de Duras utilise à contre temps noms propres, pronoms anaphoriques et système temporel, renouvelant ainsi le mode narratif, et les voies tracées d’accès au sens. Abstract : We here try to establish how, by an unusual use of proper names, anaphoric pronouns, and temporal system, Duras’s writing works on renewing narrative modes, and the trodden paths to make meaning appear.
Pourquoi Lol. V. Stein nous ravit-elle, ou pourquoi, ce qui somme toute est une question similaire, provoque-t-elle tant d’irritation ? Le titre choisi est l’obscure réponse à une question claire. Je voudrais donc d’abord expliciter les termes proposés, et rendre la réponse parlante. La cohésion textuelle est définie notamment dans le Dictionnaire d’analyse du discours de Charaudeau et Maingueneau : « Le mot cohésion désigne […] l’ensemble des moyens linguistiques qui assurent les liens intra- et interphrastiques permettant à un énoncé oral ou écrit d’apparaître comme un texte ». Vient ensuite l’énumération de quelques « marqueurs » de cohésion : « anaphores pronominales et définies, coréférence, anaphore rhétorique, connecteurs, succession des temps verbaux, présupposition, nominalisation, etc. ». Ces éléments sont, on le voit, d’ordre grammatical : « Les marqueurs de cohésion ne sont que des indices d’une cohérence à construire par un travail interprétatif » 1. Le rapport entre écriture et mémoire se trouve donc mis en jeu à double titre : la progression textuelle repose sur ce jeu d’anaphore et de renouvellement de l’information interne au texte ; mais par ailleurs, travail interprétatif et inférences ne peuvent se faire que en relation avec une mémoire intertextuelle, et avec des schèmes interprétatifs et cognitifs déjà présents à l’esprit du lecteur. En étudiant plus
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