L’Expérience du relatif est la version française de la thèse de Serge Zenkine, publiée à Moscou en 20021. L’auteur s’y fixe pour but de faire l’« archéologie » de l’idée de culture au sein du romantisme français, ce dernier étant envisagé selon deux perspectives différentes : il correspond, d’une part, à un mouvement littéraire de la première moitié du xixe siècle et, d’autre part, à un tournant dans l’histoire de la littérature, qui la fait entrer dans l’ère de la modernité, c’est‑à‑dire « le début de l’époque que nous, gens des xxe-xxie siècles, reconnaissons comme notre présent » (p. 232). Si l’étude du romantisme au sens restreint est privilégiée dans le cadre de l’ouvrage, c’est précisément parce que le relativisme culturel, alors naissant, s’y laisse observer avec la plus grande netteté. Néanmoins, d’une part, le phénomène étudié ne concerne pas exclusivement le mouvement romantique au sens étroit : Serge Zenkine propose des analyses d’?uvres de la fin du siècle, de Flaubert et de Mallarmé notamment, et laisse entendre que la réflexion pourrait être prolongée tout au long des xxe et xxie siècles. D’autre part, la notion de relativisme culturel ne permet pas de saisir tous les enjeux du romantisme français, ni même nécessairement de rendre compte de ses productions majeures :
[…] « l’idée de culture » est en conflit avec le canon littéraire du xixe siècle tel qu’il existe aujourd’hui. Située perpendiculairement à lui, à sa périphérie ou dans son sous‑sol, elle affecte surtout les « petits romantiques » et ne fait son apparition sur l’avant‑scène littéraire que dans certains cas rares et symptomatiques : une sorte d’inconscient culturel. (p. 233)
2Le relativisme culturel qu’identifie S. Zenkine est donc un phénomène à la fois mineur et essentiel du romantisme français. Souterrain, il ne se laisse pas percevoir dans les ?uvres les plus visibles de ce mouvement ; fondamental, il permet la mise au jour des bouleversements que le romantisme opère, de manière