Vanité (ou les sanglots longs)

774 mots 4 pages
Comme je pleurais intérieurement en voyant cet homme assis par terre devant moi ! Ce S.D.F., comme on nomme ça aujourd’hui, dans un politiquement correct douteux. Je pleurais non pas par pitié pour lui mais par pitié pour moi. Parce que, malgré mon envie d’aller le voir, de lui parler, de lui proposer de tout me raconter depuis le début, de lui offrir un croissant chaud, malgré toute cette envie, je ne bougeais pas. Je restais assis sur une chaise, chauffé à la terrasse d’un café (le comble du luxe pour l’homme moderne !), pétrifié par la peur et le dégoût à la fois. La peur de la réaction de l’homme, du regard des gens. Peur de ne ressentir finalement que de la mauvaise compassion pour lui et non pas de l’amour pour mon prochain comme je le pensais, le voulais profondément. Et dégoûté de ne pas bouger le cul de mon assise, de continuer de lui jeter des regards en coin, fuyants, comme si cela pouvait changer quelque chose ! On ne pouvait rien faire, justement. Cet homme était vieux, infirme, cela faisait sûrement plusieurs années que sa situation n’évoluait pas, d’hiver en printemps, d’été en automne et ainsi de suite ; cela allait continuer jusqu’à sa mort, assurément. Sa mort, l’espace d’un instant, je l’avais souhaitée, avec rage et quiétude en un même sentiment. C’était tellement plus simple ! On l’oublierait, je n’aurais plus de chances de croiser à nouveaux ses yeux vides et pourtant emplis d’un je ne sais quoi d’immense, d’infini. Ne me jetez pas la pierre, ce n’est pas ce qu’il y a de plus inhumain de souhaiter la mort de quelqu’un, au contraire. C’est tout à fait dans la nature de l’homme, tout comme il peut désirer faire don de vie à ce qu’il appellera plus tard son enfant. Alors, cet enfant, plus âgé que moi, vautré là, sur le trottoir, je souhaitais qu’il n’ait jamais été un enfant, même un embryon dans un ventre maternel. Vous comprendrez mon droit, lecteurs, j’en suis certain. Vous l’appréhenderez avec perfection, car vous avez

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