L'etat de nécessité comme cause d'exonération de la responsabilité internationale des etats
Chasser l’incertitude par l’incertitude ?
Le principe de précaution et l’état de nécessite
Cristina –Maria Arion
En 1980, en concluant son examen de l’état de nécessité comme circonstance excluant l’illicéité, Robert Ago avait affirmé que ce concept est tellement ancré dans la conscience des membres de la communauté internationale et des individus, qu’il était nécessaire de le prendre en compte dans le cadre du travail de codification de la Commission du droit international (ci-après C.D.I.), car s’il était mis à la porte, il reviendrait par la fenêtre, au besoin sous d’autres formes1.
Cette affirmation faite par Roberto Ago il y a un quart de siècle peut, dans un sens, avoir une valeur prémonitoire sur un tout autre plan : pour ce qui est de l’invocation du principe de précaution en relation avec l’état de nécessité. L’incorporation du principe de précaution dans la notion d’état de nécessité à travers la codification, évoquée par le
Rapporteur spécial James Crawford, mais pas effectuée explicitement, semble toutefois faire son retour par la fenêtre. Comme il sera montré dans cette étude, par un jeu subtil du texte et des Commentaires aux Articles de la Commission du droit international sur la responsabilité des Etats, l’incertitude scientifique est finalement prise en compte.
Par ailleurs, cette fenêtre pourrait être ouverte par l’élargissement de l’état de nécessité écologique. Bien que la Cour internationale de justice (ci-après C.I.J.) s’y soit refusée au regard des circonstances factuelles de l’affaire du projet Gabcíkovo –
Nagymaros, cet élargissement ne peut pas pour autant être exclu à l’avenir.
À cet égard, cette étude évoquera, non pas à titre de précédent, mais plutôt comme piste de réflexion, la fenêtre ouverte récemment par la jurisprudence française. Par deux décisions de première instance, le tribunal correctionnel d’Orléans, puis celui de Versailles, ont prononcé la relaxe des « faucheurs d’OGM » en faisant droit à leur