L'insociable sociabilité de kant.
Pourtant la société appelle la régulation des comportements en vertu d'un intérêt collectif. Mais il apparaît que l'Homme, de prime abord, ne se sociabilise qu'en vertu de mobiles non sociaux. Nous trouverions alors au cœur même de l'acte d'association les conditions de sa désagrégation. Néanmoins, de fait, l'Homme vit en société. Or puisque le seul intérêt empirique comporte un antagonisme de toute sociabilisation, il ne peut à lui seul expliquer ce fait.
Toutefois il est difficile d'envisager quelque autre cause de la société que ce qui serait donné au départ, dans la nature, à savoir ce même antagonisme. C'est pourquoi Kant doit présupposer qu'une certaine logique à l'œuvre dans la nature conduit l'Homme à dépasser cet antagonisme à partie de lui-même. Mais cela présuppose un calcul de la nature, une sorte de plan caché. Il reste que la nature dont il est question est celle de l'Homme et non la nature comprise comme phusis, c'est-à-dire comme champ d'investigation scientifique. Autrement dis le propos étant anthropologique, l'anthropocentrisme gagne forcément en légitimité. Or justement les inclinations empiriques de l'Homme qui constituent son "insociable sociabilité" sont toujours un certain rapport conscient à soi et non de simples instincts. Si bien que de l'actualisation de cet égoïsme primaire doit forcément résulter une forme supérieure de prise de conscience de l'impasse