L'argot
Selon certains, la fonction première de tout argot serait de chiffrer la communication, afin qu'un non-initié ne la comprenne pas. Des spécialistes du domaine comme Albert Dauzat ou Gaston Esnault se sont prononcés contre cette thèse. Pour G. Esnault, « Un argot est l'ensemble oral des mots non techniques qui plaisent à un groupe social » (définition du Dictionnaire historique des argots français de 1965). Autrement dit, s'il arrive qu'un locuteur emploie des mots d'argot pour éviter d'être compris par les non-initiés, cela ne signifie pas pour autant que le recours à des mots argotiques soit essentiellement motivé par une volonté de cryptage.
L'histoire des dictionnaires de jargon et d'argot depuis les livrets populaires facétieux de Pechon de Ruby et d'Ollivier Chereau indique au contraire qu'il faut plutôt voir dans l'argot un désir d'expressivité, qu'il soit commun à un groupe social particulier ou qu'il déborde largement cette notion de groupe (quand le mot argot est synonyme de langue verte) : en quoi les expressions abbaye de mont(e)-à-regret « potence » et huistres de Varanes (= varennes ou garennes) « fèves », recensées par Chereau (édition lyonnaise de 1630 la plus ancienne conservée), seraient-elles cryptiques ? et en quoi seraient-elles propres à un groupe particulier déterminé ?
Pour les argots de groupes, il faut intégrer dans l'expressivité de ces mots la marque de rattachement des énonciateurs à la vie et