M. amile
4 On comprend rapidement que Momo n’a pas grandi dans un contexte douillet, mais il s’est forgé
une solide personnalité. Identifiez les épisodes qui ont participé à la construction de sa person- nalité et de son identité. Un jeune adolescent qui raconte sa vie a déjà vécu un certain nombre de
« premières fois ». Le personnage de Momo, dès le début de son récit, fait apparaître le caractère fondateur de ces jalons :
– « Je devais avoir trois ans quand j’ai vu Madame Rosa pour la première fois. Avant, on n’a pas de mémoire et on vit dans l’ignorance. J’ai cessé d’ignorer à l’âge de trois ou quatre ans et parfois ça me manque » (p. 9).
– « Au début, je ne savais pas que Madame Rosa s’occupait de moi seulement pour toucher un man- dat à la fin du mois. Quand je l’ai appris, j’avais déjà six ou sept ans et ça m’a fait un coup de savoir que j’étais payé. Je croyais que Madame Rosa m’aimait pour rien et qu’on était quelqu’un l’un pour l’autre. J’en ai pleuré toute une nuit et c’était mon premier grand chagrin » (p. 9).
– « Pendant longtemps, je n’ai pas su que j’étais arabe parce que personne ne m’insultait. On me l’a seulement appris à l’école » (p. 11).
– « Au début je ne savais pas que je n’avais pas de mère et je ne savais même pas qu’il en fallait une.
Madame Rosa évitait d’en parler pour ne pas me donner des idées » (p. 11).
« Cesser d’ignorer », c’est entrer dans le temps, et dans son ordre irréversible. C’est aussi entrer dans l’ordre social et sa cruauté (le seul moyen d’apprendre qu’on est arabe, c’est être insulté, et à l’école en plus !). C’est enfin entrer dans le désordre du manque : privé d’une image aussi essentielle que celle de sa mère, Momo se trouve amputé d’une partie de sa propre histoire. Madame Rosa ayant fait un tabou de ses origines, il n’a pas plus de récit que d’image. Un lourd secret entoure sa naissance : de quel savoir cherche-t-on à le protéger ? de quelles origines non dicibles porte-t-il