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La dignité de l’homme selon Pascal
Hirotsugu YAMAJO
L’homme n’est qu’un roseau, le plus faible de la nature, mais c’est un roseau pensant. Il ne faut pas que l’univers entier s’arme pour l’écraser, une vapeur, une goutte d’eau suffit pour le tuer. Mais quand l’univers l’écraserait, l’homme serait encore plus noble que ce qui le tue, puisqu’il sait qu’il meurt et l’avantage que l’univers a sur lui. L’univers n’en sait rien.
(S231-L200)
Ce passage, l’un des plus connus des Pensées, pourrait s’interpréter comme un hommage à l’homme, la seule créature dotée de raison, de la même façon que l’Éthique à Nicomaque, qui définit le suprême bonheur humain par la vie contemplative relevant de l’exercice de son intelligence, ou que le Discours de la méthode, qui considère l’esprit humain comme le moyen universel pour atteindre la vérité. En effet Pascal déclare par la suite : « Toute notre dignité consiste donc en la pensée » (S232-L200). Mais de quelle pensée s’agit-il ? L’homme, pour être digne, doit penser à quoi et de quelle manière ? Que lui apportera une telle pensée ? Nous nous proposerons de réfléchir sur ces questions par la lecture des fragments consacrés aux thèmes très connus du « divertissement » et du
« pari ».
1. La pensée et le divertissement
Notons tout d’abord que la proposition « Toute notre dignité consiste en la pensée » n’est pas de l’ordre du constat, mais de l’ordre de la norme 1 ). En effet la phrase qui la suit : « Travaillons donc à bien penser » suggère que nous ne le faisons pas (Cf. S626-L756). La dignité humaine ne réside pas tant dans notre capacité de penser que dans la bonne direction de celle-ci : Ce n’est point de l’espace que je dois chercher ma dignité, mais c’est du règlement de ma pensée. Je n’aurai point d’avantage en possédant des terres. Par l’espace l’univers me comprend et m’engloutit comme un point,
1 )J.-L. Martinet remarque que la dignitas désigne « la qualité d’une chose ou d’une personne qui convient à telle ou telle