Alain Juillet Interview
Les secrets d'entreprise sont de plus en plus rares
Nommé fin 2003 par Jean-Pierre Raffarin, Monsieur "intelligence économique" doit aider la France à rattraper son retard en matière de guerre économique, sans jouer les James Bond.
Dans l'aile droite des Invalides, à Paris, le bruit des travaux laisse peu d'espoir de conversation. Alain Juillet ferme la fenêtre. Mais il fait chaud, même en chemisette. Il ouvre grand la porte qui donne sur le couloir. Comprenez : l'intelligence économique se pratique la porte ouverte. C'est du moins le message qu'il veut faire passer. Pourtant, monsieur "intelligence économique" n'a certainement pas été choisi au hasard. Il a mené deux carrières, l'une dans le privé, l'autre dans le secret. Il a même dirigé le renseignement à la DGSE. En décembre 2003, le président de la République l'a nommé haut responsable chargé de l'intelligence économique au Secrétariat général de la défense nationale (SGDN). Rencontre. Quelle est la définition du concept d'intelligence économique ?
Alain Juillet. Il s'agit de la maîtrise et de la protection de l'information stratégique utile pour tous les acteurs économiques. De quand cette notion date-t-elle ?
L'intelligence économique se pratiquait déjà au Moyen-Age. Mais ce sont les Anglais qui les premiers l'ont développée, il y a cinq cents ans. Les Japonais l'ont systématisée dans les années 50 et les Américains l'ont conceptualisée en 1986. En France, le rapport Martre, point de départ du mouvement, date de 1994. Un comité pour l'intelligence économique a ensuite travaillé avec Bernard Esambert en 1996. Puis, en 2003, Bernard Carayon a remis un rapport sur le sujet au Premier ministre. Où la France se situe-t-elle par rapport aux autres pays en matière d'intelligence économique ?
Un certain nombre d'entreprises, d'administrations et de ministères se sont penchés sur le thème de l'intelligence économique ces dernières années. Des chercheurs d'universités ou de grandes écoles